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Le RNDDH dénonce la banalisation des droits à la vie à La Saline

gangs armés , RNDDH
Dans un communiqué rendu public ce 18 juillet, le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) condamne la banalisation des droits à la vie, à la sécurité et à l’intégrité physique et psychique des citoyens et citoyennes de La Saline. Dénonçant la complicité des acteurs des pouvoirs exécutif et législatif, l’organisation de défense des droits humains invite le haut-commandement de la police de mettre tout en œuvre pour freiner ces assassinats. Juno7 publie ci-après l’intégralité de ce communiqué.

1. Depuis le massacre du 13 novembre 2018 orchestré et perpétré à La Saline par le pouvoir exécutif, les autorités policières ne sont jamais intervenues pour ramener l’ordre et la paix dans la communauté. Les survivants-tes ainsi que la population de La Saline ne bénéficient d’aucun accompagnement de l’Etat. Ils sont tout simplement livrés à eux-mêmes alors que toutes les personnes indexées dans l’organisation et la perpétration de ce massacre continuent de bénéficier de la protection des autorités étatiques.

2. Toutes les activités sont paralysées par une psychose de peur alimentée par les membres des gangs armés qui se livrent une lutte sans merci, organisent des raids sporadiques, tuant chaque jour, des membres de la population civile.

3. Malgré les nombreux appels lancés par des organisations de droits humains, par la presse, par des organisations internationales ainsi que par la population et les usagers de La Saline, aucune tentative d’y ramener l’ordre n’est à ce jour, réalisée.

4. C’est pourtant dans ce contexte que le Réseau National de Défense des droits Humains (RNDDH) a appris qu’au cours de la période allant du 5 au 13 juillet 2019, au moins vingt (20) autres personnes ont perdu la vie à La Saline, deux (2) sont portées disparues et six (6) autres sont blessées par balles.

5. Les informations relatives aux victimes recensées par le RNDDH et aux circonstances entourant les agressions subies, sont les suivantes :

A. Personnes assassinées le 5 juillet 2019

6. Le 5 juillet 2019, lors d’une attaque perpétrée par le gang armé de Nan Chabon dirigé par Serge ALECTIS alias Ti Junior contre le quartier de La Saline, six (6) personnes ont été tuées et deux (2) autres sont portées disparues. Le RNDDH a pu recueillir des informations complètes au sujet de cinq (5) des victimes. Il s’agit de :

• Mackenson BEAUSEJOUR alias Sonson, né le 28 décembre1988 à Port-au-Prince. Son corps a été retrouvé au marché de la Croix-des-Bossales, zone de l’Eglise Saint Joseph. Il était père de quatre (4) enfants.

• Junior JANVIER, né le 28 février 1988 à Port-au-Prince. Il a reçu une balle à la tête. Il était père de deux (2) enfants dont un (1) garçon de six (6) ans et une (1) fillette de trois (3) ans.

• Joseph JANVIER.

• Helrode PETIT-FRERE, alias Lèdè. Né à La Saline, il était âgé de trente-cinq (35) ans lorsqu’il a été enlevé par des individus armés pour être tué peu après. Feu a été mis à ses restes. Il était père d’une (1) fille.

• Jacky VINCENT. Il a été tué le 11 juillet 2019. Son cadavre a été récupéré par ses parents.

B. Personnes assassinées le 9 juillet 2019

7. Le 9 juillet 2019, le gang armé localisé dans le quartier de La Saline dirigé par Joël NOËL a riposté en attaquant celui de Nan Chabon. Six (6) personnes ont été tuées. Le RNDDH a pu recueillir les informations relatives à deux (2) d’entre elles :

• Josué PIERRE, né le 30 janvier 1977, à l’hôpital de Chancerelle. Il a reçu deux (2) balles dont une (1) au cou et une (1) à l’oreille droite. Il était père de deux (2) enfants dont un (1) garçon de dix-neuf (19) ans et une (1) fille de treize (13) ans.

• Nadège LOUIS, née le 2 février 1983 à La Saline. Elle vendait au marché de la Croix-des-Bossales lorsqu’elle a été tuée par balle. Son corps a été brulé. Elle était mère d’un (1) garçon.

C. Personnes assassinées le 13 juillet 2019

8. Le 13 juillet 2019, il s’est tenu à Nan Bwadòm une rencontre en vue de nommer un chef pour diriger le gang armé de Nan Bwadòm, en remplacement de Jean Gesner AUGUSTIN alias Nèg Pa, qui selon toute vraisemblance vient de laisser le pays. Son second Tony DERILUS alias King Toto, a réclamé la place qu’il pensait lui revenir.

9. Les chefs des autres gangs de la zone qui prenaient part à cette rencontre, dont Serge ALECTIS ALIAS Ti Junior, Eddy JULIEN connu encore sous le nom de Elie JULIEN alias Eddy Martha (comprendre : Eddy fils de Martha), et Wilson PIERRE, alias Sonson, n’ont pas accepté la requête de Tony DERILUS alias King Toto. Il s’en est suivi une vive dispute au cours de laquelle les protagonistes ont fait usage de leurs armes à feu. Au moins huit (8) personnes ont perdu la vie. Les informations précises concernant cinq (5) d’entre elles ont pu être trouvées par le RNDDH. Il s’agit de :

• Candy LUCSON né le 16 décembre 1990 à Delmas. Son cadavre a été incendié. Il était père de deux (2) enfants dont un (1) bébé de trois (3) mois.

• Théodule JULES, né en 1991. Il était père de cinq (5) enfants dont une (1) fille.
• Marc LOSANDIEU, âgé de cinquante-quatre (54) ans. Il se trouvait devant sa maisonnette située au carrefour de l’abattoir, route des rails, lorsque des individus en provenance du corridor Nan Fig ont fait feu en sa direction et l’ont criblé de balles. Il était père de trois (3) enfants dont une (1) fille.

• Jeannine LOUIS, née le 15 juillet 1949 à Léogâne. Elle était mère de cinq (5) enfants dont un (1) garçon. Elle se trouvait au marché de la Croix-des-Bossales lorsqu’elle a été criblée de balles. Ses restes ont été brulés.

• Edrice MILCAR, né le 6 avril 1981 à Port-au-Prince. Poursuivi par une dizaine d’individus armés, il tentait de s’enfuir lorsqu’il a été criblé de balles. Des riverains le conduisaient à l’hôpital lorsqu’il a rendu l’âme. Il était père de deux (2) filles.

10. Il convient de souligner que les données présentées dans ce document ne sont pas exhaustives. Le RNDDH a eu du mal à retracer certaines informations parce que parmi les nombreuses personnes tuées à La Saline se trouvaient des marchands et marchandes ainsi que des usagers de la communauté qui n’y étaient connus que sous des sobriquets.

D. Personnes Blessées par balles

11. Au cours de la période susmentionnée, le RNDDH a aussi recensé le cas de six (6) personnes blessées par balles. Il s’agit de :

• Brunel MERVILUS, âgé de vingt-et-un (21) ans et père d’une fillette. Il est atteint de trois (3) balles dont une (1) au front, une (1) au bras gauche et une (1) autre au flanc droit. Pêcheur de fruits de mer, il se trouvait au marché de la Croix-des-Bossales, en train de vendre sa marchandise lorsqu’il a été atteint.

• Jonas MICHEL, âgé de quinze (15) ans. Il est atteint d’une (1) balle au cou, côté droit. Il était assis devant sa tente installée à La Saline lorsqu’il a été atteint.

• Marie Liliane CHERY, une sexagénaire. Elle est atteinte d’une balle à l’estomac.

• Dieumène CHARLES, âgée de soixante-deux (62) ans. Elle a reçu une (1) balle à l’épaule gauche.

• Dieulifète POLYNICE, âgé de trente (30) ans. Il est atteint d’une (1) balle au pied droit.

12. Le RNDDH condamne les actes de violence perpétrés à La Saline et juge inadmissible que les autorités étatiques décident de ne pas intervenir pour protéger la vie de cette couche de la population haïtienne. Il est aussi inadmissible que le pays continue chaque jour de compter les cadavres des victimes de morts violentes, comme si cela faisait partie de la norme.

13. Le RNDDH souligne à l’attention de tous que ce sont les mêmes gangs armés protégés par les autorités étatiques, et impliqués dans le massacre du 13 novembre 2018 qui aujourd’hui encore continuent de semer le deuil à La Saline.

14. Il s’agit d’actes de violation des droits à la vie, à la sécurité de sa personne et à l’intégrité physique et psychique, consacrés et garantis par la Constitution haïtienne en vigueur et les nombreuses conventions régionales et internationales auxquelles Haïti est partie.

15. Aujourd’hui, il ne fait aucun doute qu’à La Saline – et un peu partout dans le pays – les gangs armés se renforcent et s’organisent avec l’aide des autorités étatiques alors que la Police Nationale d’Haïti (PNH) est affaiblie. Le RNDDH veut pour preuve le fait que le plan stratégique de développement de la PNH, approuvé par l’Exécutif depuis 2017, n’ait jamais été mis en œuvre. Conséquemment, la PNH est totalement dépourvue de moyens de fonctionnement. Et, les agents affectés dans les commissariats et sous commissariats entourant La Saline ne disposent pas de suffisamment de matériels pour se colleter aux gangs armés qui ne ratent d’ailleurs jamais une occasion pour démontrer leur force.

16. Le RNDDH dénonce encore une fois les rapports de proximité qui existent entre les gangs armés et les autorités exécutives et législatives qui continuent d’alimenter ou de faciliter l’alimentation des gangs en armes à feu et en munitions.

17. Le RNDDH recommande au haut commandement de la PNH de tout mettre en œuvre en vue de ramener l’ordre à La Saline, de freiner ces assassinats ininterrompus des membres de la population et de traduire par devant les autorités de jugement toutes personnes impliquées dans la perpétration de ces actes.

Port-au-Prince, le 18 juillet 2019

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