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Des familles retournent vivre dans des quartiers à risque malgré la menace des gangs

Des familles retournent vivre dans des quartiers à risque malgré la menace des gangs

À Ravin Pentad, Fort National, Christ-Roi et Croix Deprez, des citoyens tentent de reprendre possession de leurs maisons malgré la peur persistante, les affrontements armés et l’absence de l’État.

Depuis quelques semaines, un mouvement discret mais révélateur se dessine dans plusieurs quartiers de Port-au-Prince longtemps désertés à cause des violences des gangs. À Ravin Pentad, Fort National, Christ-Roi et Croix Deprez, des citoyens font le choix périlleux de retourner vivre dans les maisons qu’ils avaient abandonnées dans la précipitation, fuyant les balles, les menaces, et les exactions des groupes armés.

Si le calme apparent dans ces zones donne l’illusion d’un retour à la normale, la réalité est tout autre : il s’agit d’un calme fragile, lourd d’incertitudes. Des habitants rencontrés par Juno7, sous couvert d’anonymat, racontent les raisons qui les ont poussés à revenir malgré les dangers toujours présents. Le manque de confort et d’intimité dans les abris provisoires, la promiscuité chez des proches déjà dépassés par la situation, ou encore l’impossibilité d’imaginer un avenir ailleurs, ont été autant de facteurs déterminants.

Raymond, par exemple, avait trouvé refuge chez un parent à Pétion-Ville. Mais très vite, les conditions de vie sont devenues insupportables. « Trop de monde, pas assez d’espace, aucune tranquillité… », confie-t-il. Finalement, il a pris la décision de retourner à Croix Deprez avec sa femme et son enfant, conscient du risque encouru, mais préférant cela à une vie sans dignité.

Dans d’autres quartiers comme Cité Choun, attenant à Ravin Pentad, les signes de réintégration sont visibles. Certains habitants y passent la journée pour vaquer à des tâches domestiques : cuisiner, faire la lessive, mais regagnent des refuges plus sûrs à la tombée de la nuit. Ce mode de vie, hybride et incertain, traduit une tentative de retrouver un semblant de normalité dans un environnement toujours instable.

« Je passe mes journées sans problème, mais dès que la nuit tombe, je me rends à la ruelle Vaillant. Là-bas, certaines personnes dorment, mais moi, à cause de mes enfants, je reste éveillée. Pour l’instant, il n’y a aucun danger. C’est ce que nous confie une mère de famille. »

Depuis environ deux mois, des signes encourageants sont perceptibles : la fréquence des coups de feu a diminué, selon les témoignages recueillis par notre reporter. Les tirs ne proviennent plus du cœur des quartiers mais de zones plus éloignées, notamment Delmas 30 ou Carrefour aéroport. Le week-end passé, notre équipe a observé une relative accalmie à Ravin Pentad, Christ-Roi et dans le ghetto de Cité Choun. Toutefois, les habitants restent sur le qui-vive, surveillant les allées et venues, conscients que la moindre altercation pourrait rallumer la flamme du chaos.

« Nous sommes conscients du risque que nous prenons en retournant dans cette zone (cité Choun). Mais ce choix ne relève pas de notre responsabilité. La situation est périlleuse parce que nous ne sommes pas très loin de Nazon, et sur l’avenue Poupelard, il n’y a personne. À tout moment, les gangs peuvent faire leur retour », a témoigné un père de trois enfants.

Malgré cette volonté de reprise, le retour à la vie normale demeure une illusion pour bon nombre. Les quartiers, jadis animés, conservent un aspect désertique. De nombreuses maisons sont encore fermées, les rues peu fréquentées, les enfants rares. Et l’ombre des gangs plane toujours sur le quotidien.

Dans cette dynamique de réinstallation, le marché locatif local en subit les contrecoups. À Christ-Roi, plus précisément à la rue Mon plaisir, certaines personnes cherchent à louer des maisons, espérant profiter des prix à la baisse. Un propriétaire raconte qu’un logement de deux chambres et cuisine, autrefois loué à 75 000 gourdes, est désormais proposé à 40 000 gourdes. « Les intéressés n’acceptent pas de payer plus, ils estiment que c’est un pari risqué de venir habiter ici », explique-t-il.

Face à ce contexte, les appels à l’État haïtien se multiplient. Les citoyens exigent une présence institutionnelle renforcée, une sécurité durable, et des mesures concrètes pour accompagner ce retour fragile. « Nous ne pouvons pas vivre éternellement dans la peur ou dans des abris. L’État doit assumer ses responsabilités », martèle un habitant de Fort National.

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