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Opinion

MPCE : un nouveau logo qui modernise, mais inquiète par l’effacement des symboles nationaux

MPCE : moderniser sans effacer nos symboles

MPCE : un nouveau logo qui modernise, mais inquiète par l’effacement des symboles nationaux

Le Ministère de la Planification et de la Coopération Externe (MPCE) vient de dévoiler son nouveau logo. Issu d’un concours national remporté par le designer Yves Martin Rosier, il se veut une modernisation de l’image institutionnelle. Mais l’absence de l’armoirie nationale, pilier symbolique de notre identité républicaine, suscite de vives interrogations.

L’ancien logo portait haut nos emblèmes : le palmier, les canons, les drapeaux et la devise « Liberté – Égalité – Fraternité ». Ces éléments ne sont pas décoratifs. Ils racontent notre histoire, rappellent Dessalines, Toussaint, Pétion, Capois et tous ceux qui ont façonné l’indépendance. Leur disparition traduit plus qu’un simple choix graphique : elle reflète un glissement inquiétant.

À travers ce nouveau logo, le MPCE se rapproche des codes visuels des ONG et des agences internationales. À force de vouloir parler le langage des bailleurs, nos institutions courent le risque de s’effacer derrière eux. Or, une nation souveraine ne devrait pas avoir à choisir entre modernité et mémoire : elle doit pouvoir incarner les deux.

Dans un contexte marqué par la violence, l’effondrement social et la fragilité de l’État, ce choix résonne comme un signe d’effacement. Quand la population attend sécurité, stabilité et vision nationale, voir disparaître l’armoirie de l’identité visuelle d’un ministère central envoie un signal déroutant.

Le communiqué officiel met en avant la rigueur du concours, mais les questions demeurent : qui a composé le jury, quels étaient les critères, et surtout, pourquoi exclure l’armoirie ? Cette décision dépasse la communication. Elle relève d’un choix politique implicite. Retirer un symbole constitutionnel, c’est réécrire silencieusement l’imaginaire institutionnel.

Le designer n’est pas en cause. Yves Martin Rosier a répondu à un mandat précis. La vraie question est stratégique : quelle vision de l’État a conduit à cet effacement ? Est-ce un simple geste esthétique, ou le symptôme d’une intégration excessive à la logique technocratique internationale ?

L’armoirie nationale n’est pas qu’un logo. Elle est un bien commun, une mémoire collective et un repère identitaire. Sa mise à l’écart crée un précédent dangereux. Il devient urgent de réfléchir à un cadre légal protégeant son usage dans l’administration, afin d’éviter que des choix ponctuels n’affaiblissent ce socle symbolique.

Le débat dépasse la communication institutionnelle. Il nous oblige à poser une question essentielle : quelle place donnons-nous encore à nos symboles républicains ? Dans une époque d’instabilité, ils restent des points d’ancrage indispensables. Les effacer, c’est priver le peuple d’un lien vital avec son histoire.

Oui, Haïti doit innover et se projeter dans la modernité. Mais pas au prix de son identité. Moderniser ne devrait jamais rimer avec renier. Le MPCE a le droit de revoir sa communication, mais pas d’effacer un symbole constitutionnel sans débat démocratique.

Ce dossier, au-delà du design, met en lumière l’urgence d’une réflexion nationale sur nos repères symboliques et leur place dans la reconstruction de l’État. Une République fragilisée ne peut se permettre de perdre ses symboles.


Fito Damour
Expert en systèmes d’information
Coordonnateur de la Plateforme d’Accélération Technologique d’Haïti (PATH)

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