La crise provoquée par la pandémie du coronavirus va beaucoup impacter l’économie haïtienne déjà effondrée, estime Etzer Emile.
« Même sans le coronavirus, l’économie haïtienne serait toujours moribonde », cette phrase d’économiste Etzer Emile tonne avec tous les scénarios-catastrophes qu’on peut imaginer sur Haïti si la pandémie du coronavirus fait des ravages dans le pays comme le prédisent les autorités depuis un certain temps. Au-delà de la crise sanitaire, une crise économique aiguë se profile à l’horizon. Car « l’économie haïtienne s’était déjà effondrée avant la crise provoquée par le coronavirus. »
« La pandémie vient aggraver une situation assez préoccupante que nous avions dans le pays. Aujourd’hui les recettes de l’État notamment au niveau de la douane sont affectées. Le cours de l’inflation a aussi accéléré. Moins de devises étrangères circulent dans l’économie à cause de la baisse des transferts de la diaspora et en raison de la rareté des produits de base sur le marché due à la baisse des importations », explique Etzer Emile dans une interview accordée à Juno7.
La catastrophe sera également humanitaire dans les prochains jours, prévient M. Emile. Car bien avant le coronavirus le fonds des Nations-Unies pour l’agriculture avait prédit que 4,1 millions de personnes allaient être frappées par l’insécurité alimentaire à partir du mois de mars. Maintenant avec la présence de la maladie du covid-19 dans le pays la situation pourra s’empirer surtout quand on considère que l’État n’a pas l’argent nécessaire pour réagir convenablement face à la crise car il connaissait déjà une situation de déficit budgétaire. Si on prend l’exemple de la République dominicaine, l’État dispose uniquement pour les allocations 600 millions de dollars américains
« Il s’agit là d’un dilemme : l’État doit dépenser beaucoup pour réagir mais ne dispose pas d’argent. Cela nécessite qu’il y ait un nouveau budget dans un bref délai pour traduire les priorités du gouvernement en terme d’intervention sur le plan sanitaire et social pour prendre en charge les malades, contenir la propagation de la maladie et venir en aide aux familles. Et, avoir une idée des ressources que le pays disposera. Car mise à part le financement promis par le FMI qui est versé sur le compte de la BRH qui a offert à l’État des crédits sur la base de financement monétaire. Les autres fonds seront utilisés par les bailleurs à travers des projets exécutés en partenariat avec le gouvernement mais pas en appui budgétaire. Ce manque de ressources doit nous conduire à rationaliser nos dépenses », souligne l’économiste.
Les conséquences sur les secteurs
L’économiste a aussi souligné les impacts de cette crise sanitaire sur les entreprises locales. « Présentement le moratoire sur les crédits financiers peut aider mais après la reprise des activités les gens auront à s’acquitter de leurs dettes. Des entreprises qui ne fournissent aucun service ou qui ne vendent pas sont obligées de payer le loyer. Ces entreprises sont également touchées par l’inflation en considérant le coût des matières premières », a indiqué Etzer Emile.
Autre domaine que la crise causée par la pandémie va impacter c’est l’emploi, selon l’économiste. « Bien qu’il n’existe pas de chiffre officiel sur l’emploi dans le pays mais on estime à 50 ou 55 % de la population active qui est au chômage. Je suis certains qu’avec la pandémie qui a entraîné la fermeture des écoles, des entreprises du secteur hôtellerie et tourisme, le nombre de gens en situation de chômage a déjà augmenté. Aujourd’hui ce sont les fonctionnaires publics qui continuent de recevoir leur salaire, les gens qui travaillent dans les secteurs essentiels », a-t-il avancé.
Par ailleurs, Etzer Emile estime que lorsque 2/3 de la population sont en situation d’auto-emploi ou dans le secteur informel, appliquer des mesures de confinement n’est pas sans conséquences. C’est pourquoi, dit-il, que les gens ont l’air de faire fi des directives qui encouragent de rester à la maison et respecter une distance de 1 mètre 50 de l’autre dans la rue. Également, il avance que le pays aura besoin de beaucoup d’argent pour sortir de la crise sans conséquences majeures.
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